Loi Rist : vers un problème de santé publique majeur

Madame, Monsieur,


Dans un dossier complet rédigé en septembre 2021 (et accessible sur notre site web www.prodiesante.com), nous avions publiquement démontré le risque d’effondrement du système de santé publique en cas d’application de l’article 33 de la loi Rist.


Notre action a non seulement permis de ne pas mettre en application cet article mais également de prendre conscience de 2 axes majeurs :

Sachant que les médecins remplaçants représentent plus de 40% des effectifs soignants du système hospitalier public du pays, une telle mesure entraînerait leur fuite vers le secteur privé, leur reconversion ou leur expatriation. Suite à ces départs, la surcharge de travail imputable alors aux praticiens hospitaliers titulaires restants deviendrait ingérable, entraînant leur épuisement immédiat, le tout dans un contexte de pénurie déjà plus que critique de personnel de santé à l’hôpital. Dès lors, la prise en charge médicale généralisée ne pourrait plus être assurée et entraînerait un risque d’effondrement du système tout entier : vers un problème de santé publique majeur…

En 25 années de gestion des besoins de remplacements des hôpitaux, nous n’avons jamais connu une seule situation au cours de laquelle un médecin allait empocher 2.500 ou 3.000€ pour une garde de 24H (peut-être par une boîte d’intérim ?), « information » mensongère véhiculée par certains médias et dirigeants politiques. Alors pour quelle raison le gouvernement fait-il des médecins- remplaçants les boucs émissaires responsables du déficit du budget des hôpitaux ? Faire une généralité d’une exception est profondément inique et induit l’opinion publique en erreur. Puisque l’esprit de l’article 33 de la loi Rist vise à faire des économies sur le budget des hôpitaux (le ministre de la santé faisant de la « lutte contre les dérives de l’intérim médical une priorité d’action »), pour quelle raison les pouvoirs publics encouragent-ils le recours aux sociétés d’intérim, véritables responsables de la gabegie du système depuis des années car 5 à 10 fois plus coûteuses pour les hôpitaux que le recrutement de gré à gré (cf. illustrations ainsi que notre dossier « le scandale des agences d’intérim ») ?


Par ailleurs, sur un plan social et professionnel plus large :


A titre de comparaison, il faut compter entre 40 et 70€ de l’heure pour bénéficier des services d’un plombier, de 30 à 60€ pour un maçon et de 25 et 36€ pour une femme de ménage.


Le tarif horaire d’un médecin-remplaçant est généralement de 50€, soit un barème inférieur à celui d’un plombier ou d’un maçon. Ce montant est-il si indécent au vu de l’importance de cette profession ?

Au bout de 8 ans d’ancienneté, un praticien hospitalier titulaire (PH) perçoit en moyenne 35€ de l’heure. La différence entre le PH et le médecin- remplaçant s’explique par la précarité inhérente au statut de médecin itinérant.


La réalité est que les médecins français sont sous-payés et que leur utilité n’est pas appréciée à leur juste valeur. Un médecin, après plus de 10 ans d’études a la charge de la santé, parfois de la vie, de ses patients. Les honoraires d’un médecin généraliste (25€ la consultation) et le salaire d’un médecin hospitalier ne correspondent pas à cette responsabilité et au dévouement sans autre limite que la résistance physique dont font preuve ces professionnels.

Dans un contexte de carence tragique de professionnels de la santé où nous assistons à des vagues de démissions (épuisement des soignants, conditions de travail dégradées, manque de valorisation, carence en moyens matériels et humains, salaires honteusement bas : une infirmière gagne 1700€ brut par mois pour un temps plein), s’entêter à vouloir mettre en application l’article 33 de la loi Rist relèverait du suicide collectif et annoncerait « la mort imminente de la santé publique » (cf. notre dossier). Au programme : hôpitaux au bord de l’asphyxie et dégradation généralisée de l’offre de soins pour les patients. Une situation désastreuse pour la population.

Des recrutements, des moyens matériels supplémentaires, une revalorisation de la profession et des salaires revus à la hausse avaient été promis par le gouvernement à la sortie de la crise sanitaire. Une fois dissipés les effets de cette annonce (consciemment ?) illusoire, les soignants ne peuvent faire aujourd’hui que l’amer constat de leur situation désespérée, au bord de la rupture.


Le 1er décembre 2022, les médecins descendaient dans la rue à Paris comme en régions pour crier leur ras-le-bol : « Médecins méprisés, j’ai mal à ma vocation ». Expression d’un mal être, sentiment d’abandon et d’incompréhension de la part des pouvoirs publics à côté de toute réalité pratique.
Car la réalité du terrain n’a rien à voir avec les effets d’annonces du gouvernement. Contrairement à ce que prétendent nos dirigeants, il n’y a pas davantage de lits et de moyens, c’est même l’inverse. Dans un contexte de fermetures régulières des urgences et de services, nombre d’hôpitaux et de syndicats alertent désormais la justice pour « mise en danger du personnel hospitalier, car par ses décisions de fermetures de lits depuis des années, l’État français met en danger les personnels hospitaliers ». Les médecins estiment que le système se dirige vers une catastrophe et que les décideurs politiques sont responsables de la mise en danger des soignants et des malades. « De la pénurie de généralistes jusqu’aux urgences, le système de soins à l’hôpital est au bord de la noyade » titrait le journal Le Monde dans son article du 13 juillet 2022.


Et pour couronner le tout, le gouvernement français est aujourd’hui le seul au monde à refuser la réintégration des médecins non-vaccinés, alors que le fait d’être vacciné n’a aucun lien avec la non-transmission du virus. C’est juste un combat d’égo irresponsable face au besoin en personnel médical actuel et à la situation réelle actuelle de l’ex-pandémie de 2020.


Et malgré ce contexte alarmiste, le gouvernement s’entête à vouloir appliquer une mesure suicidaire pour la santé publique. Le gouvernement a-t-il conscience des conséquences d’une telle disposition ? Faute de médecins, les hôpitaux vont être paralysés et les patients ne pourront plus être pris en charge. De plus, disposant du plus vaste réseau de médecins en France et en Europe, nous sommes en contact avec de très nombreux soignants qui envisagent très sérieusement de quitter la France pour retrouver de dignes conditions d’exercice ailleurs. Cette démarche est le signe d’un pays qui va mal, qui ne sait pas retenir ses talents et n’accorde aucune priorité à l’essentiel.


Dans les faits, la plupart des hôpitaux fonctionne quotidiennement grâce à la présence des médecins-remplaçants. Sans eux, des salles de bloc fermeraient, le nombre de lits diminuerait et des consultations seraient supprimées. La présence de médecins-remplaçants est vitale pour eux, y compris dans les C.H.U. parisiens.

Alors que faire pour pallier cela ?


Afin de favoriser l’attractivité de la profession, fidéliser ceux qui sont déjà en poste, faire revenir ceux qui sont partis et recruter de nouveaux soignants, le gouvernement devrait procéder à une revalorisation de leurs salaires dans de justes proportions. De plus, cela représenterait une forme importante de reconnaissance de l’utilité de nos professionnels de la santé.


Ensuite, partant du principe qu’un État ne peut gérer tous les aspects de la question de la santé, il conviendrait peut-être de recourir à une répartition complémentaire des rôles. En dehors de la gestion des infrastructures hospitalières qui lui incombe, l’État devrait déléguer à des partenaires privés la gestion des ressources humaines et des équipements matériels des établissements. En effet, s’agissant de besoins vitaux et fluctuants pour les structures de soins, ces projets devraient être gérés par des acteurs ayant fait leurs preuves en matière :


1/ d’éthique, c’est-à-dire respectueux de l’accès au soin selon les bases posées par la sécurité sociale pour toutes et tous et non avec le « talent de gestionnaire » des fonds de pensions et des cabinets de conseil américains,


2/ de réactivité,


3/ et dont l’action est directe et ne nécessite pas le recours à d’innombrables intermédiaires et process administratifs paralysant une hypothétique mise en œuvre. Autrement dit, un partenariat public/privé agissant dans la même optique, en dehors de McKinsey évidemment. A ce sujet, il est parfaitement anormal qu’aucune transparence n’existe pour justifier les sommes pharaoniques attribuées par le gouvernement à McKinsey puisque cet argent est celui des impôts des françaises et des français.


Depuis l’annonce de la mise en application de l’article 33 de la loi Rist au 1er avril 2023, les hôpitaux sont en panique (témoignages disponibles sur demande).
Nous invitons les pouvoirs publics à prendre conscience de la dangerosité réelle de la mise en œuvre de la loi Rist et à en réviser les termes, faute de quoi l’opinion publique les tiendra pour seuls responsables de l’apparition d’un problème de santé publique hors du commun.


Le gouvernement a le devoir de livrer des explications claires à ses ressortissants :

Pour quelle raison a-t-il menti en affirmant avoir davantage investi dans les hôpitaux et que des lits étaient ouverts dans les services hospitaliers alors qu’en réalité plus de 5.700 lits ont été fermés en pleine crise sanitaire et que ces fermetures n’ont jamais cessé ?

Dans quel but le gouvernement oppose-t-il médecins vaccinés et non-vaccinés en affirmant que les premiers refusent de réintégrer les seconds, alors même que nos hôpitaux manquent cruellement de soignants ?

Pourquoi les pouvoirs publics ne s’attaquent-ils pas au vrai problème de la désertification des professionnels de santé de l’hôpital public en revalorisant les salaires et la profession, en construisant plutôt qu’en punissant ?

Comment expliquer le refus du gouvernement d’accueillir l’aide bénévole de milliers de médecins pouvant être gracieusement envoyés par nos soins lors de la pandémie pour sauver des vies ?


Ce communiqué est destiné à informer le gouvernement de l’intention de l’immense majorité des médecins remplaçants de refuser toute mission au tarif plafonné de la loi Rist.

Cette information étant diffusée à l’ensemble des professionnels de santé français, aux hôpitaux publics et aux tutelles (ARS, HAS…), à tous les députés, sénateurs, membres du gouvernement, conseils de l’ordre, syndicats et associations de professionnels de santé, nous laissons à la discrétion de chacun le fait de la relayer auprès des réseaux sociaux et des médias pour alerter sur une situation qui précipiterait le pays dans un chaos sanitaire sans précédent.


Pour tout échange constructif à ce sujet, nous vous invitons à rejoindre le groupe de réflexion initié par nos soins à l’adresse suivante :


https://www.facebook.com/groups/406069604428680


Cordialement.


Gilles Campedel
CEO contact@prodiesante.com